Jeudi 12 janvier 2023, la Cour Constitutionnelle a proclamé les résultats définitifs du scrutin législatif du dimanche 08 janvier. Ceci vient marquer la fin du processus électoral dans le cadre du renouvellement des membres de l’Assemblée Nationale. Un processus durant lequel l’opposition béninoise a fait une belle prestation en déjouant tous les pronostics du camp présidentiel. Après le triste épisode des exclusions de 2019, l’opposition sera de retour au parlement grâce à la victoire du parti Les Démocrates qui a conquis le cœur des électeurs et les a amenés à renouer avec les urnes.
La déception du peuple béninois est cependant énorme depuis l’annonce du verdict de la Cour qui confirme les chiffres de la CENA. Sur les 109 sièges de députés, seulement 28 ont été attribués aux Démocrates contre les 81 des partis siamois du chef de l’État Patrice Talon (53 pour l’UP le Renouveau et 28 pour le Bloc Républicain). Mais une chose dont les Béninois sont définitivement fiers, c’est la leçon qu’ils ont enseignée au gouvernement de la rupture au point qu’il recourt à la fraude pour travestir les chiffres.
En guise de rappel, au tout début du processus électoral, tout était bien organisé pour exclure une fois encore les véritables forces de l’opposition des législatives de 2023. La machine de fraude a été bien huilée par Patrice Talon et ses deux “clubs électoraux” pour empêcher Les Démocrates d’entrer en lice. Dans un premier temps, ce fut la confiscation des quitus fiscaux de certains candidats du parti Les Démocrates alors qu’ils remplissaient toutes les conditions pour l’obtenir. Par ailleurs, la CENA quant à elle, n’a pas hésité à rejeter la liste des Démocrates. Il a fallu engager une bataille juridique devant la Cour Constitutionnelle. Là encore, rien n’a été facile ou gagné d’avance. Le pouvoir, par son ingérence dans les affaires des institutions en charge de l’organisation des élections, a employé tous les moyens de pression à son actif pour exiger et obtenir le retrait de toutes les grandes figures de la liste du parti. Ce n’est qu’après cela et à l’issue d’une longue journée d’audience que la Cour finit par donner gain de cause au parti Les Démocrates en ordonnant à la CENA de lui permettre de faire des réaménagements sur sa liste de candidature. C’est ainsi que plusieurs poids lourds politiques, constituant le véritable atout du parti, se sont retrouvés à la touche.
Pendant ce temps, certains membres des institutions impliquées dans l’organisation du scrutin étaient juges et parties. Il s’agit notamment de Sacca Lafia, président de la CENA, qui continuait insidieusement de participer aux réunions de désignation des candidats de l’UP-R dans la 8ème circonscription électorale.
Quid de la campagne électorale et du scrutin ?
Pour la toute première fois depuis l’avènement de Patrice Talon au pouvoir, les campagnes électorales se sont déroulées sans violences avec une nette participation de la population. Ce qui est aussi à l’actif du parti Les Démocrates. Le seul point faible de ce parti est de n’avoir pas vraiment été présent dans toutes les localités du pays pendant la campagne. Et cela peut se comprendre bien aisément. Le parti a financé sa campagne avec le peu de moyens mis à sa disposition par les militants et sympathisants pendant que ceux du pouvoir étaient grassement financés par les caisses publiques. Mais cela n’a pas empêché le parti des présidents Éric Houndété et Boni Yayi de conquérir le cœur des électeurs qui ont voté massivement en faveur de la flamme de l’espérance. Au soir du dimanche 08 janvier 2023, dans la quasi-totalité des circonscriptions électorales, les urnes étaient largement remplies des votes en faveur des Démocrates.
Cependant, comme on pouvait s’en douter avec la machine de fraude mise en place, le président de la CENA qui est aussi membre de l’UP-R n’a pas hésité à violer le choix du peuple en plaçant son parti en tête avec 53 sièges de députés et en reléguant Les Démocrates à la troisième place avec 28 sièges comme le Bloc Républicain. On peut donc qualifier la victoire du parti UP le Renouveau de ” victoire institutionnelle” car ayant été octroyée par la CENA et la Cour Constitutionnelle. Une chose est sûre, le vrai peuple qui est sorti pour choisir ses représentants connaît le vrai vainqueur des élections et sait désormais que la première force politique du Bénin est le parti Les Démocrates. La principale victoire de ce parti déjà, c’est la participation aux élections malgré toutes les tentatives d’exclusion orchestrées par le pouvoir en place.
Face à la violation de la vérité des urnes par la CENA et la Cour Constitutionnelle, nous rappelons aux Démocrates que ce serait irresponsable d’inciter le peuple à des manifestations qui pourront dégénérer en de violents affrontements comme par le passé. Les législatives de 2023 n’étant que des élections transitoires, il faut que l’opposition comprenne cela afin de se mobiliser et se remette au travail pour les grandes joutes électorales de 2026. C’est le lieu d’inviter le président Éric Houndété à renforcer l’unité et l’union au sein des forces politiques de l’opposition. Nous rappelons à tous ceux qui se sont engagés aux côtés du peuple, qu’il est inutile d’entretenir des conflits entre leaders opposants. Il faudrait plutôt travailler à ce qu’en 2026, l’opposition ne parte plus aux élections en rangs dispersés.
Les Démocrates au Parlement
Avec 28 sièges de députés, le parti Les Démocrates sera la seule et principale force d’opposition au prochain parlement. Mais déjà, il faut que ces 28 députés du peuple prennent conscience qu’ils ne doivent pas aller à Porto-Novo pour servir de décor à l’hémicycle. Leur élection est le couronnement des combats et sacrifices de plusieurs filles et fils de ce pays qui ont osé dire ”NON” à la tyrannie. Leur mission primordiale à l’Assemblée Nationale est de travailler à porter la voix de leurs nombreux compatriotes qui se retrouvent en exil ou qui sont arbitrairement emprisonnés en raison de leurs combats politiques. Il s’agit en l’occurrence de Reckya Madougou, du professeur Frédéric Joël Aïvo et de tous les autres dont ils doivent obtenir la libération ou le retour au bercail à travers leurs droits de parlementaires.
La participation des Démocrates et leur présence au sein de la neuvième législature est déjà une grande victoire sur l’oppresseur. Le peuple doit prendre conscience de cela et savoir que la peur a déjà changé de camp. Désormais le parti Les Démocrates aura accès au financement public des partis politiques. Ce qui lui permettra de se donner les moyens adéquats pour continuer à aller au contact des populations et à occuper le terrain.
Aussi, le statut de chef de file de l’opposition devra-t-il revenir de droit au parti Les Démocrates, en particulier à son président. Sous cette casquette, le prochain grand défi du président Éric Houndété sera de redonner confiance aux millions d’électeurs qui se sont abstenus de voter le 08 janvier dernier. Le prochain chef de file de l’opposition doit se donner les moyens d’être à leurs côtés pour les inciter à renouer avec les urnes dans la perspective des élections de 2026.
En gros, il s’agira pour ces 28 députés qui feront leur entrée prochaine au parlement d’entretenir la flamme de l’espérance que la majorité du peuple a placée en eux à travers le dernier scrutin.
Comlan Hugues Sossoukpè