Permet-il de perdre du poids ?
Régulièrement, les magazines présentent le jeûne occasionnel comme une pratique favorable à la santé, pour ses supposées vertus « détox » ou pour perdre du poids. Parce qu’il existe de nombreuses modalités de jeûne occasionnel, il est difficile de tirer des conclusions des rares études scientifiques existantes, même si l’on sait que notre corps réagit au jeûne. Le point sur un sujet qui reste insuffisamment étudié.
Il y a jeûne et… jeûne
De quel jeûne occasionnel parle-t-on ? Un jour de jeûne hydrique (uniquement des boissons non caloriques) par semaine ? Un jeûne à base de jus de légumes pendant une semaine ? Un jeûne de type Ramadan qui dure, selon la saison, entre 11 et 18 heures sans nourriture ni boisson tous les jours pendant un mois ? Un jeûne partiel (seulement la moitié des calories habituellement consommées) pendant des semaines ou des mois ? Un jeûne dit « circadien », de 16h au petit-déjeuner du lendemain (voir ci-dessous) ? Il semble évident que ces différents types de jeûne auront des effets différents sur la santé.
Des études essentiellement menées chez des animaux
La plupart des études sur les jeûnes ont été menées chez les rongeurs, parfois les macaques, et il est difficile de les généraliser à l’espèce humaine. Chez l’homme, les études menées ont généralement concerné des jeûnes dits « intermittents » (1 ou 2 jours de diète hydrique) ou dits « partiels » (de plus longues durées avec moins de 1 000 calories par jour). Ces études ont essentiellement été menées chez des personnes en surpoids ou obèses dans une optique d’amaigrissement, ce qui limite leur portée pour la population générale.
Ce que l’on sait, c’est que le jeûne, quel qu’il soit, modifie le métabolisme de notre corps, contraint de trouver son énergie en brûlant des muscles et des graisses, ce qui entraîne une perte de poids et, peut-être, une réduction du risque de développer une maladie du cœur ou des vaisseaux sanguins. Le jeûne a également un effet sur la composition de notre microbiote (« flore intestinale »), ce qui pourrait avoir des conséquences importantes sur le métabolisme et la façon dont notre corps réagit au jeûne.
Le jeûne permet-il de maigrir ?
Parmi les méthodes destinées à lutter contre le surpoids, le jeûne, de l’avis de la majorité des nutritionnistes, n’a pas d’intérêt. En effet, lorsque l’apport calorique est fortement réduit, notre corps réagit d’abord en brûlant des muscles et des graisses, puis s’adapte en réduisant les dépenses caloriques de base (le « métabolisme de base »). Les effets amaigrissants du jeûne diminuent et, lors du retour à une alimentation normale, le corps apprend à stocker davantage de réserves. C’est le célèbre « effet yoyo » où la personne, une fois un régime amincissant terminé, reprend davantage de poids qu’elle en avait en débutant ce régime. Pour contourner ce phénomène d’adaptation, un système de jeûne dit « circadien » a été proposé, qui reste très controversé.
Que penser du jeûne circadien ?
Ce type de jeûne consiste à respecter tous les jours un intervalle de temps sans prise alimentaire dont la durée varie, selon les études, entre 14 et 16 heures. Dans la plupart des études, ce jeûne avait lieu l’après-midi et la nuit. Le plus souvent, ces études étaient menées chez des personnes en surpoids ou obèses.
Il est difficile de synthétiser les résultats de ces études en quelques lignes. Pour simplifier, le jeûne circadien aurait un effet positif sur le contrôle du poids, réduirait la pression artérielle, diminuerait le taux d’insuline dans le sang, améliorerait la sensibilité des cellules à l’insuline (et donc préviendrait le diabète de type 2) et, peut-être, réduirait les symptômes des maladies inflammatoires chroniques. Ces bénéfices seraient observés même chez les personnes dont le poids ne diminue pas lors de ce type de jeune.
Pourtant, certains nutritionnistes relativisent ces effets positifs. Tout d’abord parce que ce jeûne est difficile à respecter sur la durée (la sensation de faim peut perturber la qualité du sommeil), ensuite parce qu’il nuit à la vie sociale de celles et ceux qui le respectent (finis les dîners familiaux ou entre amis), et enfin parce que ce jeûne ne respecte pas les recommandations nutritionnelles. Celles-ci sont de répartir les 3 repas tout au long la journée et de faire un petit-déjeuner complet.
Ce qui est certain, c’est que le jeûne circadien ne s’adresse qu’aux adultes en bonne santé. Chez les personnes diabétiques, par exemple, le fait de sauter un repas a des conséquences négatives sur le contrôle de la glycémie tout au long de la journée. De la même manière, les femmes enceintes ou qui allaitent, comme les personnes anorexiques ou boulimiques, ne devraient jamais pratiquer ce type de jeûne.
Le jeûne occasionnel peut-il contribuer à prévenir certaines maladies ?
Les résultats d’une étude de restriction calorique menée pendant 25 ans chez les macaques rhésus par le National Institute of Aging (États-Unis) ont montré qu’avoir une alimentation réduite diminue significativement le risque de maladies cardiovasculaires et de cancers (dont le surpoids est un facteur de risque), mais n’augmente pas la longévité moyenne. Mais on parle ici de réduction calorique globale, pas de jeûne.
En ce qui concerne les effets du jeûne sur le développement des cancers, l’Institut national du cancer (INCa) a publié en 2017 un document qui synthétise les connaissances actuelles. Selon l’INCa, les études sur le sujet ne permettent pas de conclure à l’intérêt du jeûne en prévention ou en traitement des cancers. Chez les patients atteints de cancer, la perte de poids et de masse musculaire observée lors de jeûne n’est pas favorable à l’évolution de la maladie.
L’impact du jeûne sur le développement de certaines maladies comme le diabète de type 2, la maladie d’Alzheimer ou celle de Parkinson, par exemple, n’a fait l’objet d’aucune étude convaincante chez l’homme.
Pour conclure, la plupart des articles scientifiques sur les différents types de jeûne s’accordent à dire que nous manquons d’études bien menées sur ce sujet chez l’homme, car s’il existe des signes pointant vers de possibles bénéfices, rien ne permet de l’affirmer de manière certaine. Dans tous les cas, la pratique d’un jeûne occasionnel devrait se faire sous contrôle médical et respecter les recommandations en termes d’équilibre alimentaire.